C’est « le droit, pour le propriétaire d’un mur ou d’un bâtiment contigu au fonds voisin, de poser, au long de ce mur ou de ce bâtiment, les échelles nécessaires à la réparation, et généralement de faire, au long et en dehors de ces ouvrages, tous les travaux indispensables en introduisant sur le fonds voisin, les ouvriers avec leurs outils et leurs échafaudages » (Minvielle, « Dictionnaire des constructions »).
Le tour d’échelle concerne-t-il également les échafaudages suspendus?
Oui : la question du tour d’échelle se pose en principe dès lors que l’échafaudage suspendu surplombe le terrain du voisin. En effet, le propriétaire du sol est également propriétaire de l’espace aérien situé au-dessus de sa propriété.
Quel est le fondement juridique de cette servitude?
La servitude de tour d’échelle n’a pas de fondement légal. Elle existait dans l’ancien droit, mais n’a pas été reprise dans le Code civil.
Elle ne peut donc avoir qu’un fondement contractuel : il faut qu’elle ait été expressément stipulée par les parties pour exister. La servitude conventionnelle crée un véritable droit, attaché à l’immeuble.
Quelles sont les conséquences de l’existence d’une servitude de tour d’échelle ?
Comme indiqué ci-dessus, le titulaire de la servitude a le droit d’installer ses échelles et échafaudages sur le terrain voisin pour procéder aux réparations de son immeuble.
Plus encore, il peut obtenir la démolition de constructions faisant obstacle à l’exercice de sa servitude. Il en a été jugé ainsi dans une affaire récente, concernant deux murets édifiés par le voisin et qui pouvaient empêcher le requérant de bénéficier de son tour d’échelle (Cass., 3e civ., 22 janvier 2003).
Que faire en l’absence de servitude conventionnelle?
Le maître d’ouvrage doit alors tenter d’obtenir l’accord de son voisin, en formulant sa demande, si possible par voie de lettre recommandée. L’accord amiable précisera la durée nécessaire à la réalisation des travaux, les heures de passage autorisées des ouvriers sur le terrain voisin, les précautions prises pour éviter les désordres et les modalités de réparation des éventuels dégâts.
A titre de précaution, le maître d’ouvrage établira un état des lieux avec photos avant les travaux, puis un autre à l’achèvement. S’il l’estime nécessaire, il peut également faire dresser des constats d’huissier.
En cas d’échec de la tentative amiable, le maître d’ouvrage peut se tourner vers le juge (tribunal de grande instance du lieu de l’immeuble) pour obtenir une autorisation temporaire de passage et d’installation d’échelles ou d’échafaudages.
A quelles conditions peut-on obtenir une autorisation du juge pour bénéficier du tour d’échelle ?
Au fil de la jurisprudence, plusieurs conditions ont été posées.
Le tour d’échelle ne peut en principe s’appliquer que pour des travaux portant sur un ouvrage existant, et non pour l’édification d’ouvrages neufs.
Les travaux envisagés doivent être indispensables (voir par exemple l’arrêt Cass., 3e civ., 15 avril 1982, « Epoux Ducourthial »).
Les travaux ne doivent pas être réalisables autrement qu’en passant sur le terrain voisin. L’autorisation ne sera pas délivrée si les travaux sont possibles de chez soi mais plus onéreux.
Le voisin ne doit pas subir une « sujétion intolérable et excessive » du fait de l’exercice du tour d’échelle (voir Cass., 2e civ., 8 janvier 1992, « SCI Le Finchley c/ Collineau-Declercq »).
La durée d’occupation et l’espace concerné doivent être aussi limités que possibles.
Les éventuels préjudices causés au voisin doivent être indemnisés. En général, le juge des référés saisi par le maître d’ouvrage procède à une évaluation provisoire de l’indemnité due au voisin, tenant compte du trouble de jouissance lié au chantier et des éventuelles détériorations. Une fois les travaux achevés, l’indemnisation pourra être définitivement évaluée.